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Le Géant: Le ballon dirigeable de Nadar
Félix Tournachon dit Nadar (1820-1910), caricaturiste, photographe, écrivain et aérostier.
Il était fort connu pour ses talents de caricaturiste puis de photographe pour avoir immortalisé le portrait de nombreuses personnalités de l'époque.
Très intéressé par les technologies nouvelles, il se passionne dès le plus jeune âge pour les ballons.
A partir de 1857 il effectue plusieurs ascensions libres ou captives pour des essais de photographie et en 1858 il réalise la première photographie aérienne à 80 mètres du sol au dessus du petit Clamart.Aidé par les frères Godard, aérostiers connus, en 1863, il fait construire le Géant, un immense ballon de 25 mètres de diamètre, 45 mètres de haut, 6 000 m3 de gaz.
La nacelle de 2 niveaux avec une terrasse contient un bureau avec laboratoire photographique et une presse Ragueneau pour envoyer des dépêches ainsi qu'un cabinet de toilette
C'est d'ailleurs Nadar qui inspira Jules Verne pour son roman, 5 semaines en ballon paru en 1862.Son premier décollage était prévu sur le champ de Mars, à l'époque propriété de l'armée.
Il réussit à vaincre les difficultés grâce à ses relations principalement pour l'acheminement des 6 000 m3 de gaz pour lesquels une tranchée de 1 200 mètres de long sur 1,50 mètres de profondeur devait accueillir des tuyaux de 50 cm de diamètre reliant l'arrière de l'école militaire au champ de Mars.
Les problèmes de coûts, de délais, de mains d'oeuvres résolus, la date du 4 octobre 1863 fut retenue.
Adroit dans l'art d'utiliser la presse et de financer son expédition, tous les journaux français et étrangers parlaient du Géant de Nadar.
200 000 curieux ont payé leur billet pour être aux premières loges et assister au départ.
Moyennant la somme de mille francs quelques voyageurs téméraires ont pu participer à cette aventure.A 16H 30 l'immense ballon décolle lentement du champ de Mars sous les applaudissements des spectateurs.
Pour la plupart des passagers, ce spectacle de vue panoramique de la capitale était entourait d'un grand silence .ATTERRISSAGE PRES DE MEAUX APRES 5H DE VOL
Les heures passaient, avant l'arrivée de la nuit ce petit monde se mit à table. Chacun mangeait du meilleur appétit. Le jambon, la volaille, le dessert paraissaient et disparaissaient. Les vins de Bordeaux et de Champagne remplissaient les verres.
La fraicheur des soirées d'automne se faisait ressentir.Nadar n'avait pas remarqué que depuis le départ le chef d'équipe et ses deux aides avaient vidé du lest presque sans interruption.
Dans l'obscurité la plus totale, L'eau ruisselait sur les visages et d'inquiétants nuages apportaient des reflets lugubres autour de l'aéronef.Tout à coup le ballon se rapprochait dangereusement du sol, malgré les sacs de lest jetés par dessus bord.
Extrait de Terre et en l'air. Mémoires du Géant de Nadar
Nous arrivons à terre, et il est certain que c'est beaucoup plus vite que nous n'en sommes partis...
—TENEZ-VOUS BIEN!—crions-nous, pour les nouveaux, surtout:—TENEZ-VOUS BIEN!!!...
Tout à coup nous éprouvons une effroyable secousse, accompagnée de formidables craquements...
La nacelle a touché!
La première ancre, de disproportions absurdes avec la force de noire aérostat, est à peine lancée par-dessus le bord, quelle se rompt à première prise avec une nouvelle secousse si violente que notre maison d'osier semble s'effrondrer, et que toutes les mains cramponnées aux câbles de cercle lâchent prise....
Du premier choc, en se brisant elle-même, notre ancre a cassé au pied et à moitié déraciné un grand peuplier.
De ceci, nous ne savons encore qu'une chose,—c'est qu'il faut jeter bien vite la seconde ancre, — et nous rattraper non moins promptement aux cordes.
Notre pont s'est trouvé un instant dans une confusion indicible: j'ai senti dans le noir (c'est ce noir qui m'inquiète!) —rouler près de
moi un corps...
De jour, on se tire de tout;—mais la nuit!...
Nous attendons la troisième secousse...
—TENEZ-VOUS BIEN!—TENEZ-VOUS BIEN!!!...
Ouff!!!... c'est reçu!—Notre seconde ancre, aussi faible que la première, vient de se briser et nous traînons...
C'est le vrai coup dur: contre quoi, maisons, troncs d'arbres, allons-nous être lancés?...
Heureusement il n'y a pas de vent! La soupape, toujours bien ouverte, fonctionne en toute liberté, car son jeu n'est plus contrarié par le délest de tout à l'heure. Si peu de courant qu'il y ait pourtant, cette masse de gaz, qui ne se perd pas assez vite, le suit: notre nacelle, tantôt droite, tantôt sur le côté, racle un instant le sol que nous ne voyons pas. Étreignant plus énergiquement que jamais nos cordages, nous nous trouvons, selon que la nacelle est d'aplomb ou couchée, tantôt droits sur nos pieds posés, tantôt appendus par la force de nos poignets.
Mais l'aérostat perd sensiblement ses forces. L'instant approche où le poids qu'il soulève, à vrai dire, plutôt qu'il ne le traîne, va devenir trop lourd pour lui et le forcer à s'arrêter...
C'est à peu près fait! Notre nacelle, couchée sur le flanc, reste presque immobile.
—Que personne ne quitte sa place pour mettre pied à terre!...Après avoir dégonflé le ballon tout danger était écarté. Des paysans surpris arrivaient pour porter secours. Les rescapés apprenaient s'ils étaient à Barcy, près de Meaux.
Nadar était rassuré, seul son frère a le genou foulé mais s'inquiétait des commentaires moqueurs de la presse mais surtout s'interrogeait sur cette perte d'altitude très rapide du ballon. Il n'arrivait pas à obtenir de réponses des frères Louis et Jules Godard qui étaient aux commandes du Géant. En fait ils étaient responsables de la chute du Géant suite à une erreur de choix de fabrication de la soupape non conforme installée à son insu.NOUVELLE TENTATIVE QUINZE JOURS PLUS TARD
Le 18 octobre 1863 un nouveau décollage fut prévu toujours sur le champ de Mars avec neuf passagers.
Les frères Godard étaient toujours à la manoeuvre,
Napoléon III assista au départ du Géant .
L'aventure dura 18H, tout comme le premier vol les passagers ignoraient quelle direction le ballon prenait. Vers minuit ayant perdu de l'altitude ils aperçurent une gare, l'aiguilleur les informa qu'ils se trouvaient à Erquelines en Belgique. Un douanier de garde leur demanda « Que les voyageurs descendent pour la visite de la douane. ». Bien évidemment cet ordre est resté sans effet.ACCIDENT DRAMATIQUE
Le lendemain du départ vers midi près de Hanovre le ballon fit une chute brutale en raison de la force du vent et touchait le sol. Malgré le lâché des ancres et les tentatives de Louis Godard de faire échapper le gaz par la soupape, durant plusieurs heures et sur 16 km la nacelle rebondissait sur le sol arrachant des arbres et autres obstacles. Comble de malchance la soupape se referma empêchant au gaz de s'échapper, heureusement que Louis Godard au péril de sa vie à l'aide d'une hache a fendu la toile de l'aéronef qui se dégonfla rapidement avant de se stabiliser.
Tout le monde a été blessé mais trois personnes l'ont été plus grièvement dont Nadar et son épouse.Article dans le journal La PRESSE LE 22-10-1863
Article dans le journal La PRESSE LE 23-10-1863
Ses mésaventures ont été contées par toute la presse européenne et le Géant à part quelques ascensions sans grand succès et vite tombé dans l'oubli.
Par manque d'argent il continuera son activité de photographe et en 1860 il s'installe boulevard des capucines pour y créer ses ateliers.En 1870, à plusieurs, ils fondent une compagnie d'aérostiers afin de mettre à disposition des ballons militaires au gouvernement.
NADAR ET LA CARITATURE
Le Panthéon de Nadar est une lithographie représentant 250 écrivains et journalistesNADAR ET LA PHOTOGRAPHIE
Georges Sand
Charles Beaudelaire
Sarah Bernhardt
Théophile GautierSurnommé le touche à tout, il avait acquis une grande notoriété dans la photographie.
Grâce à son génie notamment dans le portrait, les grands noms de l'époque défilent dans ses ateliers.
Son frère cadet Adrien et son fils Paul seront également photographe, créant quelques conflit lors de ces dernières années
Tags : nadat, ballon aerostier, gontgolfier, decollage, accident, atterrissage
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